Que mourait Gisèle Prassinos en 2015. C’est toujours une joie lorsque je dégotte un vieux bouquin de cet auteur dans une brocante. Elle est peut-être un peu oubliée à cause d’une légèreté ludique, la simple envie de s’amuser : « C’est important l’humour, ça aide à vivre. Il faut toujours se moquer un peu de soi, prendre de la distance par rapport à ce qu’on peut dire de vous…Mes personnages, je les rends ridicules, mais j’ai en même temps une grande tendresse pour eux. Ce n’est pas un humour cruel comme on l’a parfois dit. Par exemple, lorsque j’ai écrit une histoire sur un petit garçon sans jambe qui lisait installé dans une cave, ce qui lui permettait de ne voir passer toute la journée devant lui que les jambes et les pieds des gens, on a voulu voir de la cruauté dans mon écriture. Moi, je l’aime cet enfant, avec sa souffrance et son désir : c’est plutôt naïf. »
Ce 15 novembre au bord d’une route avec les brumes de Sologne je lisais dans le fourgon de l’épicerie littéraire « Province perdue » de Luis Mizon (éditions Les Cahiers du Royaumont 1988). Autre livre de brocante, un peu oublié, un feu d’artifice d’images et de sens cachés à la fois éthéré et terriblement charnel avec des jardiniers qui vieillissent dans des bibliothèques saccagées, des contrebandiers aux œufs d’or, des antiquaires hystériques et des sorciers en exil. « Le jardinier et le bibliothécaire / échangent leurs chapeaux / leurs hiéroglyphes de sable / leurs colliers de fraises de framboises/ L’un s’habille de papier d’argent / l’autre d’immortelles / Ils rendent visite aux horloges dans les tours / il caressent décombres et terrasses / Le linge des enfants qui sèche au soleil » Va savoir s’ils ont des jambes ces enfants…