Une heure avec Lucien Wasselin, « La rage, ses abords », éd. Le dé bleu, 2001, (ouvrage à priori épuisé puisque l’éditeur a cessé d’exister mais encore disponible dans notre librairie au cas où…)
En fait l’auteur vient de me faire parvenir deux notes de lectures sur deux livres dont j’ai parlé sur ce blog et publiés par Gros Textes, ceux de Christian Bulting et de Jean-François Dubois.
Ce fut l’occasion de passer une heure avec cet ouvrage lu et certainement chroniqué dans notre revue il y a une quinzaine d’années (presque notre différence d’âge Wasselin et moi). Et moi aussi, aujourd’hui, « me voilà vieillissant avec pour seule compagnie une chatte qui passe son temps à dormir ». Quand l’humanité s’éloigne avec le dégoût, pour certains restent les chats et ceux-là doivent se reconnaître « si, un jour, totalement paranoïaque, je devenais chef d’état, j’espère qu’il me resterait ce qu’il faut de raison pour ne pas employer la bombe atomique : c’est qu’il importe de ne pas tuer les chats. » C’est par ces félins qu’ils sont encore reliés à l’humain. Ceux-là contemplent le vide en eux, les amis qui les quittent, les bonheurs boiteux mélancoliques « il faut croire au bonheur et l’inventer chaque matin. comme ce texte qui boîte un peu. » Les paysages ne sont vus qu’à travers les gouttes de pluie, les couleurs virent illico vers le sépia ou le bistre, le désespoir devient un refuge, un mode d’être, n’y touchez pas. « loin du vacarme et de la hâte, un jardin où tombe la nuit. la paix a le coût un peu triste des fruits légèrement fanés. que boivent mes lèvres ? le sens obscur du nuage qui passe devant la lune ? qu’importe après tout car nous sommes condamnés à écrire l’époque. mais où se trouve l’époque ? dans ce jardin que j’ai planté, façonné, depuis bientôt quinze ans ? dans ce monde que je fuis le soir, mais qui m’épuise le jour ? derrière, là où « tous les ponts sont coupés » ? ou bien encore, finalement, là où je me plante, obstiné, dans ma vie d’homme à la petite semaine ? »
Pour exprimer aussi bien le mal de vivre, bien sûr la chanson peut utilement être convoquée…