Je reste avec Alfonso et son bestiaire qui englobe allègrement quelques objets comme l’indique le titre (Rigoler avec une pantoufle) avec une tendresse toute particulière pour les mouches :
« Les mouches sont des saintes, elles ont de toutes petites auréoles qu’on aperçoit à peine, forcément. Si vous mettez une auréole normale, celle de saint Barnabé par exemple, sur une toute petite tête elle ne tient pas la route, elle flotte et le vent l’emporte, de même qu’une chaussure de pointure 45 ne saurait convenir à un joli petit pied délicat. Ne m’obligez pas à articuler des évidences !
Les mouches ont une vie très courte, très aléatoire, elles vont et viennent en été seulement, et les chats les bouffent, on les extermine méthodiquement de manière diabolique avec des papiers enduits de colle, on les écrase d’une claque car on les trouve désagréables quand elles se posent sur la peau. Certaines personnes se croient malheureuses et se plaignent sans cesse, je voudrais bien les voir à la place d’une mouche !
Elles sont modestes, se contentent de peu, affluent goulûment sur les bouses de vache, elles acceptent sans problème les mets les plus répugnants, franchement j’admire leur sagesse, leur faculté d’adaptation aux conditions les plus difficiles ! Certes, elles ne refuseraient pas des ortolans, mais nous les laissent de bon cœur. Elles sont altruistes.
Il paraît que le paradis ne leur est même pas ouvert… voilà une énorme injustice à mettre sur le compte du créateur ! Encore un qui n’aime pas les mouches ! »