Une heure avec Claude Held, « Propos du temps qui passe », Propos 2 éditions, http://propos2editions.com/1/boutique_1164481.html?product=73865
Ce sont des poèmes parus dans la très belle revue « Propos de Campagne ». J’ai pensé à ces souvent si émouvantes vieilles photos un peu floues où l’on peine à reconnaître des visages au seuil de l’oubli, à la pluie sur les vitres d’une cuisine quelque part à la campagne. La maison est très présente, avec des accents bachelardiens de coffre à souvenirs ou d’expression d’états d’âme ouverte au dialogue des fenêtres avec ces paysages qu’on porte aussi en soi et que la poésie démonte et reconstruit. On joue à ça (démonter / reconstruire) tant que la lumière le permet en gardant un œil serein sur le compte à rebours puisqu’on sait que « les mots / que crient / les enfants / dans un jeu / face / à l’océan / ont / une fragilité / durable ».
Claude Held dessine du paysage qui s’éloigne sitôt dessiné mais il tient toujours à nous rassurer, nous dire qu’il reste toujours un endroit, presque rien certes mais un coin sous la langue. Et pour occuper ce temps qui passe sur les maisons, les paysages et les photos, il nous laisse quelques questions : « … dessiner une maison… une maison si petite que la mort ne pourra pas entrer… maison de poupée… maison pour rire… maison facile à poser sur une table… seulement… voilà… la table a trois pieds… peur que ça bascule… peur que ça s’effondre sur les chaises autour… faut-il faire solide ?... faut-il dessiner la vérité de la table ?... quelle vérité ?... faut-il mettre la nappe et le couvert et le ciel et la nuit et la toile peinte et les cintres et les poulies et les costumes et les miroirs ?... la maison est-elle assez petite ?... et les chaises ?... sont-elles proportionnées ?... proportionnées à quoi ?... oui… à quoi ?... sont-elles raisonnables ?... savent-elles applaudir ?... savent-elles siffler ?... aimer… haïr ?... les chaises sont-elles musicales ?... la vie est-elle musicale ?... »